André maurois
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André Maurois nouvelles
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- LA FOIRE DE NEUILLY [266]
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Le lendemain matin, quand il se réveilla, il était encore tout heureux. Il se leva et s’habilla en chantant, ce qui ne lui était pas arrivé depuis son adolescence. „Ce soir, pensa-t-il, j’irai voir Irène, lui demander mon pardon“. Comme il nouait sa cravate, le téléphone sonna. —Allô! dit la voix chantante d’Irène… C’est vous, Bernard?.. Ecoutez… Je n’ai pas pu dormir. J’étais pleine de remords… Comme je vous ai traité, hier soir… II faut me pardonner… Je ne sais ce que j’avais… —Au contraire, c’est moi, dit-il… Irène, toute la nuit, je me suis juré de changer. —Quelle folie, dit-elle, surtout ne changez pas… Ah! Non! Ce qu’on aime en vous, Bernard, c’est justement ces caprices, ces exigences, ce caractère d’enfant gâté… C’est si agréable, un homme qui vous oblige à faire des sacrifices… Je voulais vous dire que je suis libre ce soir et que je ne vous imposerai aucun programme… Disposez de moi… Bernard, en raccrochant le récepteur, secoua la tête avec tristesse. LA RENTRÉEDans la voiture, en roulant vers la gare, le petit Alain fui très gai. II n’avait jamais quitté fa maison et l’idée d’entrer, comme interne, dans une école de montagne, ne lui déplaisait pas. Des camarades lui avaient raconté que l’on y travaillait moins qu’au lycée. Alain avait vu le directeur. M. Benzod, quand celui-ci était venu à Paris, et il l’avait trouvé doux et rassurant. —Vous savez, papa, il a dit que, pendant l’hiver, les classes de l’après-midi sont supprimées et que les élèves patinent ou font du ski. —J’espère que tu feras aussi un peu de latin, soupira M. Schmitt, tu en as besoin. Sur le quai, devant un train aux voitures neuves et brillantes, Alain se mit à chanter de plaisir. Il était fier de son costume beige, de sa valise de cuir, de ses gants marron, fier surtout de partir en voyage seul avec son père. —Qu’est-ce que nous allons faire dans le train, papa? —Pour moi, j’ai apporté du travail, mon petit… Toi? si tu veux, je vais t’acheter des journaux illustrés… Tu n’as pas de livre? —Non, papa, mais ça ne fait rien… Je me promènerai, dans le couloir… Je regarderai la voie… 11 disparut et revint, deux minutes plus tard, tout excité: —Papa! J’ai trouvé un camarade!.. Jean-Louis Dujarrique… Il est trois compartiments plus loin, avec sa mère. —Il rentre, lui aussi? —Oui, mais pas dans la même école que moi: lui, ça s’appelle le Prieuré[265]. —C’est dommage qu’il n’aille pas chez M. Benzod; vous auriez été deux Français. Mais vous pourrez vous voir de temps à autre… En attendant, va le rejoindre et jouez ensemble pendant le voyage. Bertrand Schmitt aimait les enfants, mais ne pouvait cacher son impatience quand son travail était interrompu par eux. Alain, qui connaissait l’air absent de sou père, se hâta de disparaître. Le train roulait. M. Schmitt, quand il levait ses yeux distraits, voyait deux garçons de douze ans, passer et repasser dans le couloir, sur un fond de poteaux, de rivières, de collines. Une heure plus tard, Alain revint, très ému: —Papa, vous savez ce qu’il m’a dit Jean-Louis? Qu’il est très malheureux dans son école… Que les grands sont cruels… Qu’on lui prend tout, ses livres, ses bonbons, et que, s’il résiste, ils le boxent ou le pressent contre un mur jusqu’à ce qu’il étouffe. —Et pourquoi ne se défend-il pas? —Mais papa, il est le seul Français de l’école… Il a supplié sa mère de ne pas le renvoyer au Prieuré, de le garder à la maison, à Paris, mais elle ne veut pas parce qu’elle vient de se remarier avec un Russe dont elle est amoureuse, le colonel Kiriline… et Jean-Louis la gêne. Son père le regarda avec surprise. —Qui t’a raconté cette histoire? —Jean-Louis. —Jean-Louis a tort de parler de ses parents sur ce ton. —Sur quel ton, papa? II m’a dit qu’il aime beaucoup sa maman, qu’elle aussi l’aimait, que depuis la mort de son père elle s’est occupée de lui très bien… Mais maintenant elle est amoureuse. —N’emploie pas des mots que tu ne comprends pas… Comment est-elle, cette Mme Dujarrique? —Mais, papa, elle ne s’appelle plus Mme Dujarrique; elle s’appelle Mme Kiriline… Elle est très jolie… Voulez-vous que je vous conduise dans son compartiment? C’est tout près. —Tout à l’heure, mon petit. —Papa, est-ce que vous croyez que, s’il y a des grands chez M. Benzod, ils vont me battre? —J’espère bien que tu rendras les coups. D’ailleurs, M. Benzod m’a paru être un homme énergique, qui doit maintenir la discipline dans son école… Va rejoindre ton ami. A Dijon, M. Schmitt descendit sur le quai de la gare pour faire quelques pas et y trouva les deux enfants. Jean-Louis était un beau petit garçon, aux grands yeux tristes et profonds. — Papa, je vous présente Jean-Louis. Bertrand Schmitt essaya de donner quelques conseils: —Si les grands vous persécutent, il faut aller à eux, faire amitié avec eux… Je ne pense pas qu’au fond ils soient méchants. —Ces types-là? dit Jean-Louis… Ils se ficheraient rudement de moi… Si on ne dit pas comme eux, ils vous mettent en quarantaine… Au départ, Alain remonta dans le compartiment de son père. —Savez-vous ce que me disait Jean-Louis, papa, au moment où vous nous avez rejoints?.. II disait: „Je suis tellement malheureux de retourner dans cette boîte que je voudrais me jeter sous les roues, seulement je n’ose pas… Pousse-moi, Alain, tu me rendras service et je te laisserai toute ma fortune…“ Parce que vous savez, comme il a perdu son papa, il a une fortune… Mais moi, je n’ai pas voulu. —J’espère bien… Il est un peu fou, ton ami… —Non, il n’est pas fou… Vous savez, papa, il dit que si sa mère se représentait sa vie là-bas, les batailles avec les grands et, le soir, dans son lit, quand il pleure, elle n’aurait pas le courage de le renvoyer dans cette école… —Conduis-moi chez cette dame. Mme Kiriline était d’une beauté surprenante. Elle fit, d’une voix douce, des remarques fines et mélancoliques sur l’enfance. Bertrand s’assit et ne quitta plus le compartiment. Quand le maître d’hôtel parut, il prit quatre tickets et les voyageurs déjeunèrent ensemble. Les enfants, silencieux, écoutaient les parents citer des titres de livres, des noms de musiciens. Ils se sentaient oubliés. De temps à autre, JeanLouis regardait Alain et ses yeux semblaient dire: „Tu vois, c’est ainsi qu’elle est…“ En sortant de table, Bertrand, sans y penser, entra dans le compartiment de Mme Kiriline et les enfants, allèrent jouer dans le couloir. —Nos fils font bon ménage, dit-elle… J’espère qu’ils pourront se voir un peu là-bas. Il hésita un instant. —Je m’excuse, dit-il, de vous parler d’un sujet qui me regarde si peu, mais les hasards d’une confidence d’enfant m’en font presque un devoir… Vous ne vous rendez certainement pas compte de l’état d’esprit de votre fils… Savez-vous ce qu’il a dit au mien? Mme Kiriline parut bouleversée. Par la fenêtre on voyait les collines devenir des montagnes, les sapins succéder aux chênes, les chalets aux maisons, les torrents aux rivières. —Mon Dieu! dit-elle… Mais c’est affreux… Pauvre petit… Je sentais bien qu’il n’aimait pas cette école, mais je mettais cela sur le compte de la paresse… Et surtout de la jalousie… Car il déteste mon mari, et il a tort, car que pourrais-je faire sans un homme dans la maison? Même pour lui, ce sera bientôt un précieux appui… —Bien sûr, dit Bertrand, mais voire fils est un enfant; il ne raisonne pas. Elle avait les yeux pleins de larmes. — Que faire? dit-elle. Pensez-vous que je devrais le ramener à Paris et renoncer à ce projet? Mon mari serait si fâché… Il dit que je gâte Jean-Louis et que je le jetterai dans la vie très mal préparé… Je crois qu’il a raison. Jean-Louis est un petit garçon qui a trop d’imagination… Depuis ce mariage il croit qu’il est une victime… Ce n’est pas vrai, pas vrai du tout, mais quand un entant s’est mis une idée dans la tête… Mme Kiriline et son fils descendirent deux ou trois stations avant Bertrand. Quand ils furent partis, Alain resta quelques instants silencieux. — Papa, dit-il enfin, si les grands sont trop méchants, je vous télégraphierai et vous viendrez me chercher, n’est-ce pas? LA FOIRE DE NEUILLY[266]— Bonnivet avait cinq ou six ans de plus que moi, dit Maufras, et sa carrière avait été si brillante, si rapide, que je l’avais toujours considéré plutôt comme un patron que comme un ami. Je lui devais beaucoup de reconnaissance. C’était lui qui m’avait appelé à son cabinet au moment où il était devenu Ministre des Travaux Publics, lui encore qui, lorsque le ministère était tombé, m’avait admirablement „casé“ dans l’administration préfectorale. „Quand il revint au pouvoir, il prit les Colonies[267]; j’avais alors à Paris un poste agréable et lui demandai de m’y laisser. Nos relations demeuraient affectueuses et nos deux ménages prenaient souvent leurs repas ensemble, chez l’un ou chez l’autre. Nelly Bonnivet était une femme de quarante ans environ, encore jolie, adorée par son mari et parfaite épouse de ministre. J’étais marié depuis dix ans et vous savez combien Madeleine et moi avons toujours été heureux. „Au début de juin, les Bonnivet nous invitèrent à dîner dans un des restaurants du Bois. Nous étions six: la soirée fut gaie; vers minuit, nous n’avions nulle envie de nous séparer. Bonnivet, qui était d’humeur exquise, proposa d’aller à la Foire de Neuilly. Il aime, quand il est au pouvoir, à jouer au sultan Haroun-al-Raschid[268] et à entendre, sur son passage, la foule murmurer: „Tiens, c’est Bonnivet“. „Trois couples mûrissants qui essaient en vain de trouver à des jeux puérils la saveur de l’enfance, donnent un spectacle assez mélancolique. Nous gagnâmes, en diverses loteries, des macarons[269], des bateaux de verre filé et des animaux de pain d’épice; les trois hommes abattirent des pipes tournantes et des coquilles d’œuf que soulevait un jet d’eau languissant. Puis nous arrivâmes devant un chemin de fer circulaire que recouvrait, après un ou deux tours à ciel ouvert, une bâche formant tunnel. Nelly Bonnivet proposa d’y monter; Madeleine ne semblait pas trouver le jeu bien drôle ni les coussins très propres, mais elle ne voulut pas troubler la tête et nous prîmes des tickets. Dans le tumulte du départ, notre groupe fut coupé en deux tronçons. Je me trouvai seul dans un compartiment avec Nelly Bonnivet. „Ce petit train tournait fort vite et les courbes en avaient été dessinées de façon à projeter les uns sur les autres les occupants des voitures. Mme Bonnivet, au premier tournant, faillit tomber dans mes bras. A ce moment la bâche nous plongea dans l’obscurité et je serais tout à fait incapable de vous expliquer ce qui se passa pendant les quelques secondes qui suivirent. Nos corps agissent quelquefois sans contrôle de la conscience. Toujours est-il que[270] je sentis Nelly à demi étendue sur mes genoux et que je la caressai comme un soldat de vingt ans caresse la fille qu’il a emmenée à la foire du village. Je cherchai ses lèvres, toujours sans savoir ce que je taisais et au moment où, sans rencontrer de résistance, je les atteignais, la lumière revint. D’un commun accord nous nous écartâmes l’un de l’autre avec une extrême brusquerie et nous nous regardâmes, éblouis, stupéfaits. „Je me souviens d’avoir essayé alors de comprendre ce qu’exprimait le visage de Nelly Bonnivet. Elle remettait ses cheveux en ordre, me regardait gravement et ne disait pas un mot. Ce moment de gêne fut très bref. Déjà le train freinait et un instant plus tard nous retrouvions, sur la plate-forme circulaire, Bonnivet, Madeleine et les deux autres. „— Ceci est vraiment un peu trop jeune pour nous, dit Bonnivet avec ennui; je crois qu’il est temps d’aller se coucher. „Madeleine l’appuya et nous regagnâmes la Porte Maillot[271] où le groupe se disloqua. En baisant la main de Nelly, je cherchai ses yeux; elle parlait gaiement avec Madeleine et partit sans un signe. „Je ne pus dormir. Cette aventure inattendue troublait l’équilibre, si parfaitement stable, de ma vie. Je n’avais jamais été un coureur de femmes et moins que jamais depuis mon mariage. J’aimais Madeleine de tout mon cœur et il existait entre nous une confiance tendre et sans réserve. Pour Bonnivet j’avais de l’affection et une sincère gratitude. Le diable était que malgré tout, je brûlais d’envie de revoir Nelly et de savoir ce que signifiait son regard après l’abandon. Surprise? Rancune? Vous savez quelle fatuité se cache au cœur des hommes les plus modestes. J’imaginais une longue passion silencieuse se déclarant soudain à la faveur d’un hasard. Près de moi dans son lit jumeau du mien[272], Madeleine respirait doucement. „Le lendemain matin, je fus très occupé et n’eus guère le loisir de penser à ce surprenant épisode. Le jour suivant, je fus appelé au téléphone: „— On vous demande du Ministère des Colonies, dit une voix… Restez à l’appareil, le Ministre veut vous parler… Ne quittez pas. „Un frisson traversa mes reins. Jamais Bonnivet ne téléphonait lui-même. Invitations et réponses étaient transmises par nos deux femmes. Il ne pouvait s’agir que de cette stupide aventure. „— Allô! dit soudain la voix de Bonnivet… Ah! c’est vous, Maufras?.. Pourriez-vous venir jusqu’à mon bureau?.. Oui, c’est urgent… Je vous expliquerai de vive voix… Alors à tout de suite! Merci. „Je raccrochai… Donc Nelly appartenait à cette espèce odieuse des femmes qui tentent les hommes (car c’était elle, je l’aurais juré, qui, ce soir-là était tombée sur moi volontairement) et vont ensuite se plaindre à leur mari: „Tu sais, tu as tort d’avoir confiance en Bernard… Il n’est pas l’ami que tu crois…“ Détestable race! „Tout en cherchant un taxi pour me rendre chez Bonnivet, je me demandai ce qui allait arriver. Un duel? Je l’aurais souhaité, au moins était-ce une solution simple, mais depuis la guerre, on ne se battait plus. Non, Bonnivet allait sans doute m’accabler de reproches et me signifier que nos relations étaient terminées. C’était la fin d’une amitié précieuse et sans doute aussi la fin de ma carrière, car Bonnivet était puissant. Tout le monde disait qu’il serait bientôt Président du conseil[273]. Et qu’allais-je dire à Madeleine pour lui expliquer cette incompréhensible rupture? „Ces pensées et d’autres, plus sinistres, se pressaient en moi tandis que je roulais vers le ministère. J’en arrivais à comprendre que le suicide fût considéré comme une évasion par tous les malheureux qui se sont placés dans une situation trop difficile pour leur courage. „J’attendis quelque temps dans une antichambre peuplée de solliciteurs et d’huissiers. Mon cœur battait irrégulièrement. Je regardais une fresque qui représentait dés Annamites[274] au temps de la récolte. Enfin l’huissier appela mon nom et je me levai. La porte du bureau de Bonnivet était devant moi. Fallait-il le laisser parler? Ou au contraire prévenir la scène par une confession totale? „Ce fut lui qui se leva et me serra les mains. Je fus frappé par la bienveillance de son accueil. Peutêtre avait-il eu l’intelligence de comprendre ce que l’incident avait eu de fortuit et d’involontaire? „— Avant tout, dit-il, je m’excuse de vous avoir ainsi convoqué d’urgence, mais vous allez voir qu’il fallait prendre une décision immédiate. Voici… Vous savez que nous devons, Nelly et moi, faire le mois prochain un grand voyage en Afrique occidentale… Voyage d’inspection pour moi; voyage de tourisme et de découverte pour elle… J’ai décidé d’emmener non seulement des fonctionnaires du ministère, mais aussi quelques journalistes, car il est nécessaire que les Français apprennent à connaître leur Empire… Je n’avais pas pensé, jusqu’ici, à vous parler de ce projet parce que vous n’êtes ni un colonial, ni un journaliste, et que d’autre part vous avez votre poste, mais Nelly m’a fait remarquer hier soir que notre voyage coïncide, à une semaine près[275], avec vos vacances, que vous serez pour elle, votre femme et vous, des compagnons plus intimes et plus agréables que notre cortège d’officiels et que peut-être cette occasion de voir l’Afrique dans des conditions assez rares vous tenterait… Donc, si vous acceptez, votre ménage fora partie de la croisière… Seulement j’ai besoin de le savoir tout de suite, car mes bureaux achèvent eu ce moment les listes et les programmes. „Je le remerciai et lui demandai quelques heures pour consulter ma femme. J’avais d’abord été tenté. Dès que je fus seul, je me représentai ce qu’aurait de gênant, et d’odieux, une intrigue vaguement amoureuse menée sous les yeux vigilants de Madeleine et alors que je serais l’hôte de Bonnivet. Nelly était belle mais je la jugeai sévèrement. Pendant le déjeuner, je racontai l’offre à Madeleine, sans dire, naturellement, ce qui l’avait provoquée et cherchai avec elle les moyens de refuser sans impolitesse. Elle imagina sans difficulté quelques engagements antérieurs et nous n’allâmes pas en Afrique. „Je sais que Nelly Bonnivet parle de moi, depuis ce temps-là, non seulement avec ironie, mais avec un peu d’hostilité. Notre ami Lambert-Leclerc a l’autre jour cité devant elle mon nom comme celui d’un candidat possible à la Préfecture de la Seine[276]. Elle a fait la moue. „Maufras! à-t-elle dit, quelle idée! Il est très gentil, mais il n’a aucune énergie. C’est un homme qui ne sait pas ce qu’il veut“. „Bonnivet a répondu: „Nelly a raison“, et je n’ai pas été nommé“. Download 0.74 Mb. Do'stlaringiz bilan baham: |
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