Cours d’introduction à l’analyse économique Pascal da Costa


Chapitre 3 Financement de l’économie et rôle


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Chapitre 3
Financement de l’économie et rôle
de la monnaie
À quoi sert la monnaie ? Comment détermine-t-on sa valeur et qui en est garant ?
La quantité de monnaie en circulation a-t-elle des effets sur l’économie réelle ? Autant
de questions sur lesquelles les économistes s’opposent depuis fort longtemps et pour les-
quelles nous tenterons d’apporter des éléments de réponses dans ce chapitre. En revanche,
nous pouvons dès à présent répondre aux questions suivantes : qu’est-ce qu’un besoin de
financement ? Et comment est-il satisfait ?
Généralement, les agents assurent le financement de leurs besoins grâce à leurs propres
ressources. Mais lorsque ces dernières s’avèrent insuffisantes (on parle alors d’un besoin
de financement
, en opposition à une capacité de financement), il devient nécessaire de
recourir soit au système de crédit, soit au système financier. C’est la distinction que fait
Hicks (1974) entre économie d’endettement et économie de marchés financiers.
Au niveau macroéconomique, il est intéressant de noter que les ménages parviennent
à épargner une partie de leurs revenus sous différentes formes et qu’il se dégage ainsi,
de façon structurelle, une capacité de financement ; globalement, les entreprises disposent
également d’une capacité de financement, et ce depuis le milieu des années quatre-vingt
en France, ce qui n’était généralement pas le cas avant cette période ; par contre, l’État
français est lui devenu structurellement en situation de besoin net de financement depuis
la fin des années soixante-dix.
Au niveau microéconomique, les banques commerciales financent l’économie en ac-
cordant des crédits aux ménages ou aux entreprises. Mais de ce fait, elles font aussi
augmenter la quantité de monnaie en circulation dans l’économie, car elles accordent des
liquidités immédiates contre une promesse de remboursement futur. Sans une autorité qui
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contrôle ces crédits, ce système de financement peut donc devenir excessivement infla-
tionniste. Une telle autorité de contrôle est incarnée par la banque centrale, qui est garant
de la valeur de la monnaie et a pour objectif principal de lutter contre l’inflation. Mais
les ressources empruntées n’ont pas que des effets économiques négatifs ! Elles peuvent
aussi être favorables pour l’économie puisqu’elles entraînent une augmentation de la de-
mande globale (avec une hausse de la consommation et de l’investissement) et donc de
la croissance. C’est cette croissance économique (qui s’accompagne d’une hausse des re-
venus) qui va justement permettre le remboursement des crédits octroyés aux agents. En
revanche, en cas de ralentissement de la croissance, les revenus stagnant (voire diminuant
en termes réels) peuvent ne plus être suffisants pour rembourser les dettes contractées.
Que peuvent faire les agents dans ce cas ? Souvent, ils doivent s’endetter de nouveaux
afin de rembourser les dettes ! C’est un cercle vicieux qui mène rapidement au surendette-
ment
. Ainsi, le financement d’une économie par le crédit peut finalement engendrer deux
risques économiques : le surendettement et l’inflation.
Les marchés financiers représentent l’autre moyen par lequel l’économie réelle est fi-
nancée. Les entreprises peuvent en effet aller directement sur ces marchés à la rencontre
des offreurs de capitaux, sans passer par l’intermédiaire des banques. Il ne vous a pas
échappé que certaines pratiques sur les marchés financiers peuvent s’avérer dangereuses
pour le système financier et l’économie réelle tout entière. En effet, les ressources dispo-
nibles sur ces marchés (l’épargne) peuvent se diriger vers des projets sans aucune finalité
d’investissements productifs (la spéculation pure) : à long terme, ce phénomène entraîne
la formation de bulles spéculatives, soit une évolution des marchés financiers sans aucun
lien avec l’économie réelle.
L’origine de la crise des subprimes de 2007 ou 2008 est plus complexe encore (da Costa,
2013). Le fait que la crise des subprimes se soit transformée en quelques années en crise
financière mondiale, puis en crise économique internationale, illustre la grande confusion
qu’occasionne l’entremêlement des systèmes d’économie d’endettement et d’économie de
marchés financiers. Cette crise a plongé les États-Unis dans la récession (qui depuis déjà
plusieurs années arrivaient à la fin d’un long cycle de croissance) et a atteint fortement
d’autres zones dans le monde. Même la France fut touchée, alors qu’elle ne pratiquait
pas le crédit hypothécaire à risque et que ses banques avaient des trésoreries pleines
et réalisaient des profits élevés (20 milliards d’euros en 2006). La crise était d’autant
plus difficile à prévoir que la majorité des acteurs du monde financier américain louait
la qualité des innovations en matière de crédit hypothécaire et autres produits boursiers
sophistiqués (dont la titrisation) qui ont été dans les années passées, il faut le reconnaître,
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d’une très grande efficacité pour favoriser l’activité économique et la création de richesses.
Revenons plus en détails sur l’origine de cette crise.
Initialement, la crise des subprimes concernait des ménages américains insolvables qui
s’étaient endettés pour acheter des biens immobiliers avec des crédits dits à prêt hypo-
thécaire, c’est-à-dire gagés sur la valeur du logement, et à taux variable. C’est la chute
du prix de l’immobilier américain et la remontée simultanée des taux d’intérêt qui a ini-
tié la crise. Il faut préciser que ces crédits avaient été titrisés, c’est-à-dire qu’ils étaient
regroupés et convertis en titres mis sur les marchés financiers (le fameux entremêlement
des économies d’endettement et de marchés financiers) ; titres qui ont été achetés par de
nombreux opérateurs ainsi que d’autres banques pour leurs propres clients. Sur le papier,
l’idée première était de réduire le risque que supportait la banque en prêtant de l’argent
à un emprunteur, grâce à la création de portefeuilles construits spécialement pour cela
qui étaient cédés à d’autres acteurs financiers : les banques ne supportant théoriquement
plus le risque, elles sont dans les faits devenues très laxistes sur les gages demandés aux
candidats à l’emprunt, au point, pour certaines, d’octroyer des prêts élevés à des ménages
qu’elles savaient déjà insolvables ! Aussi, de nombreux ménages américains aux revenus
trop faibles sont devenus propriétaires de leur logement pendant la première moitié des
années 2000. Sur cette période, les États-Unis ont donc connu un véritable boom sec-
toriel qui s’est terminé finalement par l’éclatement d’une bulle spéculative avec la chute
des prix sur le marché de l’immobilier. La conjonction de ménages insolvables et d’une
crise immobilière a entrainé la faillite d’un grand nombre de banques et d’opérateurs des
marchés financiers au bout de quelques mois, détenteurs de créances douteuses. Immédia-
tement, les conditions du crédit se sont durcies en réponse à cette insolvabilité massive en
entraînant un manque de liquidités sur le marché monétaire, les entreprises ayant du mal
à emprunter pour investir. Les conséquences de la crise s’en sont alors trouvées décuplées.
En septembre 2008, la crise prend la forme d’une crise de confiance sur les marchés
financiers suite à la faillite de la grande banque américaine : Lehman Brothers. La peur
du risque systémique était alors très grande : à l’image d’une cascade de dominos, les
banques seraient très nombreuses à faire face à un risque de faillite causé par la disparition
de quelques banques seulement. Face à ces craintes, les banques centrales américaine
(FED) et européenne (BCE) ont diminué leurs taux et les gouvernements des mêmes
zones ont recapitalisé les banques fragilisées. Aux États-Unis, le Plan Paulson (novembre
2008), doté de plus de 700 milliards de dollars, avait pour but de financer le rachat des
créances douteuses détenues par les banques américaines, ainsi que de recapitaliser les
banques américaines en cas de besoin (augmentation de capital). Dans le cas de ce plan,
il ne s’agisait donc pas d’une mesure de relance budgétaire (chapitre 4 suivant), son but
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premier étant d’éviter la faillite de certaines banques américaines pour ne pas subir de

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